Richard Millet

Rouge-gorge

2018 ‒ 56 pages ‒ 12 x 21 cm

Mon frère avait trouvé le temps avant moi.
Tout le premier, il avait tenu cet or dans sa paume ; puis il était descendu dans le fleuve au bord duquel les hommes rient ou gémissent en oubliant ce qu’ils sont, disait-il, sans tenir compte, lui, qu’il était mon cadet de deux ans et que je n’avais pas atteint ma dixième année. Il était trop petit pour soutenir ce qu’il avançait. Il prétendait pourtant n’être pas tout à fait ce que les mots font de nous, ni tel que les autres nous songent. Il sentait la fougère, la myrtille, la tourbe, et y voyait à travers les halliers et les ronces. Il parlait comme les arbres qui remuent dans le vent du soir. On le comprenait sans tout à fait l’entendre. Ses mots semblaient des oiseaux tombant sous la nuée. Il avait, selon ma sœur, l’âge de la joie, du silence et de l’ombre.

Richard Millet phrase encore ici ce «temps chanté» de Siom, village imaginaire et miroir littéraire de Viam en Corrèze, lieu natal de l’auteur, où la polyphonie des voix de son enfance, que l’on entend comme un chœur antique, hante ce récit – ou long poème en prose – où s’appréhendent ensemble la vie, dans sa structure la plus secrète, le temps et la mort.

  • 13 exemplaires numérotés accompagnés d’une peinture de Jean-Gilles Badaire.
    150 euros.
  • 587 exemplaires sur vélin.
    15 euros.